La porte s’ouvrit presque aussitôt, et il se trouva en présence d’un valet en habit noir, grave, rasé, si parfait de tenue que Duroy se troubla de nouveau sans comprendre d’où lui venait cette vague émotion : d’une inconsciente comparaison, peut-être, entre la coupe de leurs vêtements. Ce laquais, qui avait des souliers vernis, demanda, en prenant le pardessus que Duroy tenait sur son bras par peur de montrer les taches :
— Qui dois-je annoncer ?
Et il jeta le nom derrière une porte soulevée, dans un salon où il fallait entrer.
Mais Duroy, tout à coup perdant son aplomb, se sentit perclus de crainte, haletant. Il allait faire son premier pas dans l’existence attendue, rêvée. Il s’avança, pourtant. Une jeune femme, blonde, était debout qui l’attendait, toute seule, dans une grande pièce bien éclairée et pleine d’arbustes, comme une serre.
Il s’arrêta net, tout à fait déconcerté. Quelle était cette dame qui souriait ? Puis il se souvint que Forestier était marié ; et la pensée que cette jolie blonde élégante devait être la femme de son ami acheva de l’effarer.
Il balbutia : — Madame, je suis… — Elle lui tendit la main : — Je le sais, monsieur. Charles m’a raconté votre rencontre d’hier soir, et je suis très heureuse qu’il ait eu la bonne inspiration de vous prier de dîner avec nous aujourd’hui.
Il rougit jusqu’aux oreilles, ne sachant plus que dire ; et il se sentait examiné, inspecté des pieds à la tête, pesé, jugé.
Il avait envie de s’excuser, d’inventer une raison pour expliquer les négligences de sa toilette ; mais il ne trouva rien, et n’osa pas toucher à ce sujet difficile.
Il s’assit sur un fauteuil qu’elle lui désignait, et quand il sentit plier sous lui le velours élastique et doux du siège, quand il se sentit enfoncé, appuyé, étreint par ce meuble caressant dont le dossier et les bras capitonnés le soutenaient délicatement, il lui sembla qu’il entrait dans une vie nouvelle et charmante, qu’il prenait possession de quelque chose de délicieux, qu’il devenait quelqu’un, qu’il était sauvé ; et il regarda Mme Forestier dont les yeux ne l’avaient point quitté.
Elle était vêtue d’une robe de cachemire bleu pâle qui dessinait bien sa taille souple et sa poitrine grasse.
La chair des bras et de la gorge sortait d’une mousse de dentelle blanche dont étaient garnis le corsage et les courtes manches ; et les cheveux relevés au sommet de la tête, frisant un peu sur la nuque, faisaient un léger nuage de duvet blond au-dessus du cou.
Duroy se rassurait sous son regard, qui lui rappelait, sans qu’il sût pourquoi, celui de la fille rencontrée la veille aux Folies-Bergère. Elle avait les yeux gris, d’un gris azuré qui en rendait étrange l’expression, le nez mince, les lèvres fortes, le menton un peu charnu, une figure irrégulière et séduisante, pleine de gentillesse et de malice. C’était un de ces visages de femme dont chaque ligne révèle une grâce particulière, semble avoir une signification, dont chaque mouvement paraît dire ou cacher quelque chose.
Après un court silence, elle lui demanda : — Vous êtes depuis longtemps à Paris ?
Il répondit, en reprenant peu à peu possession de lui : — Depuis quelques mois seulement, madame. J’ai un emploi dans les chemins de fer ; mais Forestier m’a laissé espérer que je pourrais, grâce à lui, pénétrer dans le journalisme.
Elle eut un sourire plus visible, plus bienveillant ; et elle murmura en baissant la voix : — Je sais.
Le timbre avait tinté de nouveau. Le valet annonça : — Madame de Marelle.
C’était une petite brune, de celles qu’on appelle des brunettes.
Elle entra d’une allure alerte ; elle semblait dessinée, moulée des pieds à la tête dans une robe sombre toute simple.
Seule une rose rouge, piquée dans ses cheveux noirs, attirait l’œil violemment, semblait marquer sa physionomie, accentuer son caractère spécial, lui donner la note vive et brusque qu’il fallait.
Introduction :
- antécédent du livre : Georges Duroy a rencontré un ancien compagnon qui s'est converti dans le journalisme et qui l'invite afin de le faire rentrer dans le journalisme lui aussi en le présentant à son patron.
- Rapport entre le livre et l'auteur : Ce roman a été écrit à partir de l'expérience du journalisme de Maupassant.
I) Georges Duroy, un personnage impressionné, surpris et gêné mais qui joue son avenir :
- antithèses : montre bien tout le gène de Duroy devant un valet, qu'il trouve mieux habillé que lui.
- point de vue de Duroy ( interne ) : montre bien que Duroy est surpris, timide durant toute la scène, à cause des manières d valet, des décors...
- rythme ternaire : montre toute la peur de Georges Duroy, toute sa gêne; au point qu'il ne peut plus bouger.
- champ lexical des verbes de timidité : Duroy est vraiment intimidé.
- évocation du théâtre : la porte est montrée comme un rideau qu'on soulèverait, il est étonné tant la maison est luxueuse, il ne peut croire qu'un ancien colon comme lui soit arrivé à avoir tout cela.
- comparaisons : montre les décors et les personnes comme des choses créées par l'homme, une serre et une actrice qui joue son rôle; il n'en croit pas ses yeux de toutes ces richesses.
II) Mme forestier, première personnalité vue par Duroy à travers les décors de sa maison :
- champ lexical du bien vêtu : montre que même les valets de Mme forestier sont bien habillés, elle est une femme respectable.
- énumération d'éléments liés à la mode de l'époque, Mme Forestier se veut être une femme respectable.
- comparaison : le décor est montré comme factice créé par l'homme, comme il est associé à la maîtresse de maison, on en conclut que le côté factice de Mme forestier est également montré ici.
- champ lexical du sensuel : montre bien que Mme forestier est également une femme attirante, introduit le futur mariage et les envies temporaires de Duroy pour cette femme.
III° Mme Forestier : deuxième personnalité vue par Duroy; lorsqu'il est troublé en entrant :
- description approximative, étonnante pour un roman réaliste.
- phrase indirecte libre : Duroy se demande qui est cette femme, il n'ose pas vraiment l'examiner. Il l'observe juste rapidement et la trouve aimable mais de classe sociale supérieure.
- accumulation de verbes d’examen : montre que Duroy se rend compte, par sa gène que Mme Forestier l'examine, elle est intelligente et sait bien juger les gens.
IV) Mme Forestier, troisième personnalité vue par Duroy, lorsqu'il est assis dans le fauteuil, calmé :
- champ lexical du plaisir : montre que son nouveau ressentit est en parti due à cette femme, qu'il trouve finalement très charmante et associe à la réussite.
- champ lexical du corps : montre la description physique de Mme Forestier, ( faite par un homme qui s’intéresse directement à la taille et la poitrine ;) ). Duroy la trouve belle et élégante. malgré sa graisse.
- antithèses :montre que à l'image de son physique, c'est une femme avec différentes personnalités.
- rapport à une autre femme : Mme forestier plait à Duroy.
V) Mme de Marelle :
- vocabulaire familier : il ne voit pas en elle une personne aussi haut placée que Mme Forestier mais déjà quelqu'un avec qui il pourrait avoir une relation.
- description réaliste : montre qu'elle porte moins d'artifices que la maîtresse de maison, elle a une tenue plus provocante ==} Duroy peut s'imaginer une liaison avec elle rien qu'en la voyant.
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