jeudi 22 janvier 2015

"Au Lecteur", du recueil Les Fleurs Du Mal, Baudelaire

La sottise, l'erreur, le péché, la lésine,
Occupent nos esprits et travaillent nos corps,
Et nous alimentons nos aimables remords,
Comme les mendiants nourrissent leur vermine.

Nos péchés sont têtus, nos repentirs sont lâches ;
Nous nous faisons payer grassement nos aveux,
Et nous rentrons gaiement dans le chemin bourbeux,
Croyant par de vils pleurs laver toutes nos taches.

Sur l'oreiller du mal c'est Satan Trismégiste
Qui berce longuement notre esprit enchanté,
Et le riche métal de notre volonté
Est tout vaporisé
par ce savant chimiste.

C'est le Diable qui tient les fils qui nous remuent !
Aux objets répugnants nous trouvons des appas ;
Chaque jour vers l'Enfer nous descendons d'un pas,
Sans horreur, à travers des ténèbres qui puent.

Ainsi qu'un débauché pauvre qui baise et mange
Le sein martyrisé d'une antique catin,
Nous volons au passage un plaisir clandestin
Que nous pressons bien fort comme une vieille orange.

Serré, fourmillant, comme un million d'helminthes,
Dans nos cerveaux ribote un peuple de Démons,
Et, quand nous respirons, la Mort dans nos poumons
Descend, fleuve invisible, avec de sourdes plaintes.

Si le viol, le poison, le poignard, l'incendie,
N'ont pas encor brodé de leurs plaisants dessins
Le canevas banal de nos piteux destins,
C'est que notre âme, hélas ! n'est pas assez hardie.

Mais parmi les chacals, les panthères, les lices,
Les singes, les scorpions, les vautours, les serpents,

Les monstres glapissants, hurlants, grognants, rampants,
Dans la ménagerie infâme de nos vices,

Il en est un plus laid, plus méchant, plus immonde !
Quoiqu'il ne pousse ni grands gestes ni grands cris,
Il ferait volontiers de la terre un débris
Et dans un bâillement avalerait le monde ;

C'est l'Ennui ! - l'oeil chargé d'un pleur involontaire,
Il rêve d'échafauds en fumant son houka.

Tu le connais, lecteur, ce monstre délicat,
- Hypocrite lecteur, - mon semblable, - mon frère !



Dans l'introduction :
Baudelaire est un poète français du 19e siècle qui fit des poèmes modernes.
Ce poème est le premier du recueil, il n'est pas numéroté et sert de préface.
Ce poème est composé de 10 quatrains en alexandrins et en rimes embrassées.
Les 2 premiers quatrains = l'homme et le pêché
Les 5 quatrains après = Le diable
Les 3 derniers quatrains = l'Ennui



La vision de Baudelaire de l'homme :
- l'homme est rempli de faiblesse ( accumulation )
- l'homme est dans l'illusion 
- l'homme ne fait pas ce qu'il veut ( métaphore )
- l'homme n'est pas bon et aime le mal ( oxymore vers 3 et antithèse vers 7)


Le Diable et l'homme :
- La culpabilité de l'homme ne vient pas de ses actions mais de la religion ( champ lexical ).
- Le poème n'est pas centré sur Dieu mais sur le diable ( champ lexical des créatures de l'enfer), il est d'ailleurs rempli de connaissances ( savant chimiste).


L'avènement du Spleen ( mélancolie, ennui ...) :
- Baudelaire prépare l'arrivée du  pire mal qu'il y ait sur terre en annonçant toutes le créatures monstrueuses de la Terre ( accumulation ), leurs adjectifs ( accumulation). Enfin, il décrit ce mal avec une répétition du superlatif.
- Baudelaire énonce les caractéristiques du pire mal avec notamment une répétition.
- Baudelaire annonce le Mal, L'ENNUI, en un phrase et avec une ponctuation forte.
- Baudelaire décrit l'ennui comme un personnage cruel, oriental avec une allégorie.




Un message au lecteur :
- utilisation de pronoms nous et tu qui s’adressent au lecteur.
- dans le dernier vers, Baudelaire s’adresse au lecteur et les mots lecteur et frère sont à la coupe de l'hémistiche et en fin de vers.


Un poème moderne :
- Le vocabulaire "cru".
- Le vocabulaire courant associé à du très ancien
- Oxymores contraires à la morale

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