samedi 20 juin 2015

Lecture analytique : Bel-ami; l'incipit, Maupassant.

Quand la caissière lui eut rendu la monnaie de sa pièce de cent sous, Georges Duroy sortit du restaurant. Comme il portait beau, par nature et par pose d’ancien sous-officier, il cambra sa taille, frisa sa moustache d’un geste militaire et familier, et jeta sur les dîneurs attardés un regard rapide et circulaire, un de ces regards de joli garçon, qui s’étendent comme des coups d’épervierLes femmes avaient levé la tête vers lui, trois petites ouvrières, une maîtresse de musique entre deux âges, mal peignée, négligée, coiffée d’un chapeau toujours poussiéreux et vêtue toujours d’une robe de travers, et deux bourgeoises avec leurs maris, habituées de cette gargote à prix fixe. Lorsqu’il fut sur le trottoir, il demeura un instant immobile, se demandant ce qu’il allait faire. On était au 28 juin, et il lui restait juste en poche trois francs quarante pour finir le mois. Cela représentait deux dîners sans déjeuners, ou deux déjeuners sans dîners, au choix. Il réfléchit que les repas du matin étant de vingt-deux sous, au lieu de trente que coûtaient ceux du soir, il lui resterait, en se contentant des déjeuners, un franc vingt centimes de boni, ce qui représentait encore deux collations au pain et au saucisson, plus deux bocks sur le boulevard. C’était là sa grande dépense et son grand plaisir des nuits ; et il se mit à descendre la rue Notre-Dame-de-Lorette.Il marchait ainsi qu’au temps où il portait l’uniforme des hussards, la poitrine bombée, les jambes un peu entr’ouvertes comme s’il venait de descendre de cheval ; et il avançait brutalement dans la rue pleine de monde, heurtant les épaules, poussant les gens pour ne point se déranger de sa route. Il inclinait légèrement sur l’oreille son chapeau à haute forme assez défraîchi, et battait le pavé de son talon. Il avait l’air de toujours défier quelqu’un, les passants, les maisons, la ville entière, par chic de beau soldat tombé dans le civil.Quoique habillé d’un complet de soixante francs, il gardait une certaine élégance tapageuse, un peu commune, réelle cependant. Grand, bien fait, blond, d’un blond châtain vaguement roussi, avec une moustache retroussée, qui semblait mousser sur sa lèvre, des yeux bleus, clairs, troués d’une pupille toute petite, des cheveux frisés naturellement, séparés par une raie au milieu du crâne, il ressemblait bien au mauvais sujet des romans populaires. C’était une de ces soirées d’été où l’air manque dans Paris. La ville, chaude comme une étuve, paraissait suer dans la nuit étouffante. Les égouts soufflaient par leurs bouches de granit leurs haleines empestées, et les cuisines souterraines jetaient à la rue, par leurs fenêtres basses, les miasmes infâmes des eaux de vaisselle et des vieilles sauces. Les concierges, en manches de chemise, à cheval sur des chaises en paille, fumaient la pipe sous des portes cochères, et les passants allaient d’un pas accablé, le front nu, le chapeau à la main. Quand Georges Duroy parvint au boulevard, il s’arrêta encore, indécis sur ce qu’il allait faire. Il avait envie maintenant de gagner les Champs-Élysées et l’avenue du bois de Boulogne pour trouver un peu d’air frais sous les arbres ; mais un désir aussi le travaillait, celui d’une rencontre amoureuse. Comment se présenterait-elle ? Il n’en savait rien, mais il l’attendait depuis trois mois, tous les jours, tous les soirs. Quelquefois cependant, grâce à sa belle mine et à sa tournure galante, il volait, par-ci, par-là, un peu d’amour, mais il espérait toujours plus et mieux. La poche vide et le sang bouillant, il s’allumait au contact des rôdeuses qui murmurent, à l’angle des rues : « Venez-vous chez moi, joli garçon ? » mais il n’osait les suivre, ne les pouvant payer ; et il attendait aussi autre chose, d’autres baisers, moins vulgaires.




Eléments de l'introduction :
- Maupassant est un auteur réaliste qui eut une expérience des colonies. Il s'inspira des ses expériences personnelles sur le journalisme et sur la société, les colonies pour écrire ce roman.
- Cette scène est l'incipit du roman, c'est à dire la première scène du livre; celle qui nous fait entrer dans l'histoire et qui donne un avant-gout de tout le roman.


I) Une description physique réaliste du héros, Georges Duroy :
- énumération de l'aspect physique : la représentation de Duroy est très réaliste.
- champ lexical du mouvement : la façon de se déplacer est décrite, le portrait en est plus réaliste.
- Bel-ami ; le titre du roman montre Duroy comme un homme beau.

II) Le portrait mental de Duroy :
- champ lexical de l'argent, l'argent est une chose très importante pour Duroy.
- vocabulaire péjoratif : Duroy a beau être beau extérieurement, il ne l'est pas intérieurement.
- analyse des gestes : Duroy se sent supérieur aux autres.
- point de vue interne : montre le manque d'argent de Duroy ainsi que sa catégorie sociale, populaire.

III) Les principes du réalisme dans l'extrait ( en plus des descriptions ) :
- antithèses : montre l'amour comme lié aux prostituées, c'est l'opposition au romantisme
- le début immedia res : grand principe du réalisme qui fait qu'on rentre tout de suite dans le thème de l'histoire, le rapport en Duroy et l'argent.

IV) Duroy traque une proie, une femme qui l'aidera à monter dans la hiérarchie :
champ lexical du mouvement de conquérant : Georges Duroy se déplace comme un combattant, comme un chasseur, qui traque sa proie, une femme qui l'aidera à atteindre la richesse et le pouvoir. Les femmes le remarque et se tournent vers lui tant il les impressionne par sa posture et sa beauté.
champ lexical de l'attitude : ( pareil que au dessus)
champ lexical de la femme : c'est bien une femme que Duroy chasse, qu'il recherche pour assouvir son rêve de victoire, de pouvoir et de richesse.
allocution scientifique : la moindre parcelle du corps de Duroy est analysée et montre qu'il traque une femme, sa pupille petite montre qu'il regarde au loin comme on regarderait un oiseau dans le ciel.
énumération de l'habillage des femmes avec un rythme ternaire : Cela montre bien que la femme que Duroy traque ne peut pas être de n’importe quelle situation sociale, il  les trie pour trouver celle qu lui permettra 'arriver le plus haut possible;


V) Une description réaliste de l'environnement de la scène :
- vocabulaire péjoratif + comparaison + personnification : montre toute la pauvreté du quartier de Duroy, quelque part dans Paris
- énumération de dates : la période de l'années est connue afin de rendre plus réaliste la description. L'année n'est pas dite afin que cette description réaliste soit vrai de tout temps.


VI) L'amour montré comme Maupassant le voit :
- antithèse : montre que l'amour est bien une chose matérielle, que l'on peut vole, que l'on peut utiliser pour faire un délit.
- vocabulaire d'argot : montre tout le rapport entre l'amour et l'argent.
- antithèses : montre l'amour comme lié aux prostituées, c'est l'opposition au romantisme
- antithèse : l'amour n'est pas clairement défini, il n'existe peut être pas tel que nous l'imaginons   ( avis personnel : Mais peut-être a-t-il raison, Ah peut-être que l'amour n'est qu'une illusion qui nous fait et Refait souffrir, peut-être que dans notre monde Il N'est pas possible d’espérer d'autre que l'amitié En réalité ... 

1 commentaire:

Kim Olivares a dit…

Énonciation :Narrateur extradiégétique / CHANGEMENT DE FOCUS:
L-1/13 omniscient
L- 14/22 interne
Thème de l’œuvre : L’ascension sociale au cœur d'une société.


Problématiques :
- Qu'apprend on réellement sur le personnage dans cet incipit ?
- Comment ce texte remplit-il sa fonction d'incipit ?
- En quoi cette présentation du personnages oriente t-elle le lecteur ?

Quelle présentation du personnage cet incipit donne-t-il ?


I- Une présentation réaliste, fidèle à la tradition romanesque:

Présentation du personnage et du cadre:
- Repères spatio-temporels l-14 "28 juin"; l-23 " rue Notre-Dame-de-Lorette."
- Ancrage référentiel avec la notion d'argent tout au long du récit.
- Portrait physique "Comme il portait beau etc...." l-3 à 5;
- Portrait moral du personnage car on remarque qu'il aime être regardé, qu'il est calculateur, et bon vivant qui vit aussi la nuit " son grand plaisir des nuits"

Présentation de l'intrigue :
- Début "in media res"( au milieu de l'action)
- Situation sociale et financière du personnage , célibataire, sans argent " Il lui restait juste en pôche 3 francs 40 pour finir le mois" l-15, bon vivant "grand plaisir des nuits" l-22

Horizon d'attente :
- Récit d'ascension sociale, récit d'apprentissage, on se doute que le personnage va chercher à s'extraire de cette situation

II- Un personnage complet mais surtout complexe :

Un homme calculateur :
- Compte le moindre de ses sous, et projette ce qu’il va en faire.
- Rapport à l’argent → convoitise, mépris de son statut.

Rapport particulier aux femmes :
- Discours Indirect libre
- Figures et constructions , termes "cupidité"; "veule"
- Champs lexical du regard, Énumération sur les femmes du restaurant, pour lesquelles il a un rapport particulier.
-Il leur fait beaucoup d'effet, toutes le regarde et il a pour elles un " de ces regards de joli garçon, qui s'étendent comme des coups d'épervier"l-6-7

Un portrait complet, les bons points et les mauvais
- Portrait pas très valorisant
- Détails montant des aspects du personnages
- Manipulateur -> il joue de son pouvoir d'attirer le regard des femmes.

Ex:

Un Incipit à diverses fonctions à remplir, il est le commencement de texte est à pour rôle principal d'informer sur le cadre de l'oeuvre, il permet d'estimer comment le roman tout entier s'engendre à partir de cette première phrase et modèle un horizon d'attente.Guy de MAUPASSANT (1850-1893), longtemps peu considéré, devient un modèle suite à la parution de sa première oeuvre majeure "boule de suif". il nous présente ici un roman naturaliste Bel-ami (1885) qui narre l’histoire de l’ascension d’un homme de faible classe sociale, l’écrivain brosse ainsi un large tableau satirique de la société parisienne. l'extrait de type narratif ici étudié est l'Incipit de ce roman où l’on rencontre le personnage principal dans un moment de sa vie : Georges Duroy. Nous pourrions nous demander
comment cet incipit donne comme vision du cadre de l'histoire ? nous verrons qu'il montre le portrait apparent de Duroy, puis nous observerons qu'il offre la vision du vrai visage de duroy avec subtilité avant de remarquer qu'il donne un vision du cadre de vie du protagoniste, de paris et de la société.

I- Le visage apparent de Duroy
II- Le vrai visage
III- Une vision de Paris et de la société